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Alors que l’on parle plus souvent de biogaz lorsqu’il est question de biométhanisation considérant l’attrait évident qui émane de son potentiel énergétique, il ne faut pas non plus négliger le digestat, l’autre extrant généré par le procédé. À des fins de comparaison, le digestat obtenu par le procédé de biométhanisation est l’équivalent du compost obtenu par le procédé de compostage. Dans le procédé de biométhanisation, le digestat demeure au fond de la cuve du digesteur alors que le biogaz, de par sa densité beaucoup plus faible, s’accumule à partir du sommet. Il est très encourageant de constater que des deux côtés de l’Atlantique, l’industrie du biogaz peut se réjouir de voir le digestat de plus en plus reconnu officiellement en tant que matière résiduelle fertilisante (MRF).
Le digestat, obtenu sous forme relativement liquide ou solide, constitue un excellent produit fertilisant car il s’agit d’une substance riche en nutriments pour les végétaux. En effet, l’azote (N), le phosphore (P) et le potassium (K) contenus dans les intrants du digesteur sont tous des éléments ne se retrouvant pas dans le biogaz et qui demeurent ainsi dans le digestat. Alors que le biogaz est extrait de la matière organique en absence d’oxygène dans le digesteur, le digestat restant, qui représente entre 90% et 95% du volume d’intrants, est constitué d’un mélange de ces éléments fertilisants ainsi que de résidus non-biométhanisables et de micro-organismes morts.
Des deux côtés de l’Atlantique
Le Québec a reconnu les vertus fertilisantes du digestat et confirme qu’il y a un potentiel commercial pour ce produit en tant qu’engrais pour l’agriculture. Le Guide des MRF 2015 clarifie d’ailleurs le statut du digestat en tant que MRF et a par conséquent mis en place des mesures pour réduire le fardeau administratif auparavant nécessaire pour les producteurs afin d’obtenir l’acceptation de leur digestat en vue de le commercialiser pour l’épandage en agriculture. Cette mesure a été prise considérant la construction annoncée de plusieurs usines en marge du Programme de traitement des matières organiques par biométhanisation et compostage. Alors que les engrais minéraux représentaient près des deux tiers des épandages sur terres agricoles au Québec, l’utilisation des MRF est ainsi appelée à connaître une importante croissance d’ici 2020 grâce à l’environnement politique favorable.
Même son de cloche en Europe où a été déposée le 17 mars 2016, au Parlement européen à Bruxelles en Belgique, une proposition en vue de modifier la régulation européenne des produits fertilisants et rendre les MRF plus librement accessibles au marché. En effet, environ la moitié des fertilisants commercialisés sur le territoire européen sont exclus du cadre législatif actuel, incluant entre autres pratiquement l’ensemble des produits fertilisants issus de matières et procédés organiques. Cette mesure favoriserait ainsi grandement les activités des opérateurs publics et privés qui recueillent les matières résiduelles organiques (MRO). Ils pourraient effectivement valoriser plus facilement leurs extrants, ce qui stimulerait par la même occasion les investissements dans les infrastructures nécessaires au traitement des MRO, notamment par biométhanisation, tout en favorisant le développement de nouveaux produits fertilisants à base de MRO.
Alors que les changements climatiques vont engendrer des pertes financières globales de 2,5 trillions USD, montant qui pourrait même grimper à 24 trillions USD (17% des actifs financiers globaux) dans le pire scénario projeté d’après une étude de la London School of Economics, il importe d’implanter rapidement des procédés, pratiques et solutions plus écologiques au niveau des industries de l’énergie et de l’agriculture. Grâce à son digestat, la biométhanisation permet de sauver l’énergie ainsi que réduire les ressources fossiles nécessaires à la production d’engrais minéraux synthétiques à base de gaz naturel. Sans oublier que le biogaz constitue un substitut évident aux carburants fossiles. C’est entre autres pour ces raisons que la biométhanisation contribue grandement à optimiser l’économie circulaire globale et à diminuer significativement l’empreinte carbone humaine en vue d’atteindre les objectifs de limitations du réchauffement climatique.
Par Simon Lefebvre | 2016-04-05
Sources: Biogas-Info.co.uk, Ministère DDELCC du Québec – Guide MRF, European Commission (Circular Economy Package: COM(2016) 157 – Proposal for a Regulation), The Guardian, Farmers Weekly (image)